Omar Barghouti : « La campagne BDS vise à forcer Israël à se conformer au droit »


ENTRETIEN RÉALISÉ POUR L'HUMANITE 

PAR PIERRE BARBANCEY

LUNDI, 16 JANVIER, 2017

 


Des centaines de personnes ont manifesté devant le Palais de justice de Toulouse, le 22 septembre 2016, en soutien aux quatre militants BDS qui comparaissaient devant le tribunal. Photo :Rémy Gabalda/AFP
Des centaines de personnes ont manifesté devant le Palais de justice de Toulouse, le 22 septembre 2016, en soutien aux quatre militants BDS qui comparaissaient devant le tribunal. Photo :Rémy Gabalda/AFP

Cofondateur du mouvement Boycott, désinvestissement, sanctions (BDS), Omar Barghouti dénonce la répression israélienne et dénie toute accusation d’antisémitisme. Il déplore la criminalisation de BDS par Paris et montre que cette campagne, qui ne cesse de progresser, est crainte par Tel-Aviv. 

Qu’est-ce que le mouvement Boycott, désinvestissement, sanctions (BDS) ?

OMAR BARGHOUTI C’est un mouvement non violent lancé en 2005 par la société civile palestinienne et qui cherche à contribuer au combat du peuple palestinien pour ses droits. Il vise à forcer le régime israélien d’occupation et de colonisation à se conformer au droit international comme cela avait été fait en son temps contre le régime d’apartheid d’Afrique du Sud. Plus spécifiquement, le mouvement BDS cherche à en finir avec l’occupation des territoires palestiniens et arabes depuis 1967, ce qui inclut le démantèlement des colonies et du mur, mais aussi avec son système de discrimination raciale qui touche les citoyens palestiniens et qui s’avère un système d’apartheid, selon la définition de l’ONU. BDS veut également le retour des Palestiniens dans leur maison d’origine d’où ils ont été expulsés à l’occasion d’un nettoyage ethnique. Ces trois droits basiques correspondent aux trois principales composantes du peuple palestinien : ceux de la bande de Gaza et de la Cisjordanie, incluant Jérusalem (soit 38 % du peuple palestinien, selon les chiffres de 2014), les Palestiniens citoyens d’Israël (12 %) et ceux qui sont en exil (50 %). Plus des deux tiers des Palestiniens sont des réfugiés ou des personnes déplacées dans leur pays même.

Certains disent que le boycott relève de l’antisémitisme.

OMAR BARGHOUTI Le mouvement BDS se réclame de la Déclaration universelle des droits de l’homme. Il est non sectaire et rejette toutes les formes de racisme, y compris l’islamophobie, l’antisémitisme et les dizaines de lois israéliennes racistes. Le soutien des juifs à la campagne BDS a grossi exponentiellement ces deux dernières années. Un sondage réalisé en 2014 pour le compte de l’organisation américaine J-Call et concernant les juifs américains a montré que 46 % des hommes juifs américains non orthodoxes âgés de moins de 40 ans soutenaient un boycott total d’Israël pour en finir avec l’occupation. De même, le soutien à l’organisation Voix juive pour la paix, qui est un partenaire stratégique pour le BDS aux États-Unis, a nettement augmenté ces deux dernières années. Le mouvement BDS n’a jamais visé les juifs ou les Israéliens en tant que juifs. BDS vise Israël et les entités complices de ce régime d’oppression, non pas sur la base d’une identité réelle ou clamée, qu’elle soit religieuse, ethnique ou autre, mais sur le fait que ce régime dénie aux Palestiniens les droits stipulés par les lois internationales de l’ONU. BDS vise la complicité, pas l’identité. Il appelle à des droits égaux pour tout humain, quelle que soit son identité. Un aspect souvent négligé du texte fondateur du BDS est son appel direct à conscientiser les Israéliens pour « soutenir le mouvement dans l’intérêt de la justice et d’une paix réelle ». En fait, les partenaires juifs israéliens au sein du mouvement BDS jouent un rôle significatif en dénonçant le régime israélien d’oppression et en préconisant son isolement. Israël, et sa machine de propagande bien huilée, accuse immédiatement tout supporter de BDS d’être antisémite. C’est une forme d’intimidation pour faire taire toute contestation. C’est une tactique particulièrement utilisée contre les Européens et les Américains qui soutiennent le boycott, les rendant coupables de l’Holocauste. Tactique qui permet à Israël, depuis des décennies, de forcer au silence face à l’oppression que subissent les Palestiniens. Mais cette accusation d’antisémitisme ne marche pas avec les Palestiniens, victimes du sionisme et des projets coloniaux, qui n’ont joué aucun rôle dans l’Holocauste et ne devraient pas en payer les conséquences.

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