Le conflit israélo-palestinien est le grand oublié de la diplomatie française par Ellen SALVI (Mediapart)


DIPLOMATIE - ANALYSE

Article paru le 21 janvier 2020

 

Emmanuel Macron se rend en Israël et dans les territoires palestiniens les 22 et 23 janvier. Une visite essentiellement consacrée aux questions mémorielles. Depuis au moins dix ans, la France ne considère plus le conflit israélo-palestinien comme une « urgence ». Pour de nombreux diplomates, cette indifférence rend la situation « explosive ».

 

https://www.mediapart.fr/journal/international/200120/hold-pour-mardi-13h00-ou-19h00-le-conflit-israelo-palestinien-est-le-grand-oublie-de-la-diplomatie

 

Emmanuel Macron l’a rapidement glissé aux journalistes, le 15 janvier, en marge de ses voeux à la presse : il ne se rend pas en Israël et dans les territoires palestiniens, les 22 au 23 janvier, dans le but de proposer un énième plan de paix, mais afin de faire peser la France de tout son poids dans la résolution du conflit qui mine le Moyen-Orient, sur la base de la solution à deux États, avec Jérusalem comme capitale commune. Solution que sa diplomatie invoque depuis des années comme un mantra.

 

Comme plusieurs autres dignitaires étrangers, le chef de l’État a été invité par le président israélien Reuven Rivlin dans le cadre du 75e anniversaire de la libération du camp d’Auschwitz-Birkenau et du lancement du 5e Forum mondial sur la Shoah. 

 

« C’est un voyage dont l’objet est mémoriel », insiste l’Élysée, précisant toutefois que ce déplacement, le premier en Israël depuis le début du quinquennat, sera aussi l’occasion de « parler politique, et donc […] de traiter avec le premier ministre Netanyahou de la question de la paix entre les Israéliens et les Palestiniens ».

 

Une question dont le président de la République avait décidé de s’emparer en début de mandat, échangeant à plusieurs reprises sur le sujet avec Benjamin Netanyahou et le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas, tous deux reçus à Paris. Un voyage officiel avait même été annoncé courant 2018 et Édouard Philippe devait également se rendre dans la région pour la seconde édition du séminaire intergouvernemental. Mais ces projets ont été brutalement abandonnés au printemps de cette même année.

 

Si l’Élysée évoque de simples « questions de calendrier et d’agenda » pour justifier le report de cette visite officielle, d’autres, à l’instar de Denis Charbit, professeur de sciences politiques à l’Open University d’Israël, expliquent que le déplacement a en réalité été différé sine die« afin de ne pas apparaître comme une approbation de la nouvelle donne provoquée par l’annonce [en mai 2018 – ndlr] du transfert de l’ambassade américaine de Tel-Aviv à Jérusalem ».

 

« Dans les circonstances présentes, une visite ne tournerait qu’à l’avantage de Netanyahou, lequel pourrait alors se prévaloir de compter Emmanuel Macron parmi ses hôtes dans le sillage de leaders tels que Donald Trump, Viktor Orbán, Rodrigo Duterte et Matteo Salvini. Aucune percée diplomatique n’est à attendre d’une telle visite », écrivait en 2019 l’auteur du livre Israël et ses paradoxes (éditions Le Cavalier bleu), dans un article de l’Annuaire français de relations internationales.

 

Cette fois-ci, le président de la République n’a pas eu d’autre choix que de répondre favorablement à l’invitation de Reuven Rivlin. Mais outre le fait qu’il sera essentiellement consacré aux questions mémorielles, son déplacement dans la région ne laisse guère présager, lui non plus, d’avancées diplomatiques, tant la situation politique sur place reste instable.

 

En Israël, les deux dernières élections législatives,organisées en avril puis en septembre 2019, ont débouché sur une impasse. Un nouveau scrutin, le troisième en mois d’un an, se tiendra le 2 mars.

 

D’ici-là, « il est quand même difficile d’obtenir des engagements décisifs », reconnaît l’Élysée. Les échanges qu’Emmanuel Macron aura mercredi avec Reuven Rivlin, Benjamin Netanyahou et Mahmoud Abbas, permettront tout de même de « faire le point » sur le dossier israélo-palestinien, « mais aussi, autant que possible, de poser les jalons de ce que nous pourrons faire ensuite », ajoute l’entourage présidentiel.

 

« Les visites des présidents français dans les territoires palestiniens sont des prix de consolation, regrette un diplomate. Elles sont présentées comme des avancées diplomatiques pour dire “on est impliqués”, mais c’est de la blague. »

 

Pour éviter d’insulter l’avenir, c’est-à-dire l’après législatives, l’Élysée a aussi fait savoir dans un premier temps que le chef de l’État rencontrerait, toujours mercredi, le principal adversaire de Netanyahou, l’ancien chef d’état-major Benny Gantz, à la tête du nouveau parti de centre-droit « Bleu et blanc », qui a fait une percée lors des élections de septembre 2019 – cependant, ce rendez-vous ne figure pas au programme prévisionnel adressé aux journalistes.

 

« “Bleu et Blanc” est le parti le plus similaire à En Marche! », souligne la députée LREM Aurore Bergé, qui sera du voyage en qualité de présidente du groupe d’amitié France-Israël à l’Assemblée nationale. L’élue assure qu’il ne sert à rien de chercher une interprétation politique au déplacement des 22 et 23 janvier. « La situation est tellement compliquée que personne ne peut dire ce qu’il adviendra en mars prochain », dit-elle.

 

Le journaliste israélien Daniel Ben-Simon, ancien député travailliste à la Knesset, estime lui aussi qu’« il est risqué de prédire les choses », tant Benjamin Netanyahou est « capable de tout au dernier moment ». Ayant noté « une certaine froideur » lors des précédents échanges entre Emmanuel Macron et le premier ministre israélien, il ajoute : « Je pense que Macron ne l’aime pas, mais qu’il connaît son poids, notamment sur Trump. »

 

Mis en examen pour « corruption », « fraude » et « abus de confiance » depuis novembre 2019, et désormais décrié jusque dans son propre parti, le Likoud, Netanyahou reste incontestablement l’homme fort d’Israël, même si beaucoup insistent sur le fait que le pays ne se résume « heureusement pas » à sa seule personne. Celui à qui Emmanuel Macron avait donné du « cher Bibi »en juillet 2017 a déjà connu trois présidents de la République française depuis Nicolas Sarkozy. Et aucun d’entre eux n’a jusqu’ici réussi ni à l’impressionner ni même à infléchir sa position vis-àvis de la Palestine.

 

« Tous ceux qui ont essayé ont été déçus », indique Jean-Paul Chagnollaud, professeur émérite des universités et président de l’Iremmo (Institut de recherche et d’études Méditerranée Moyen-Orient).

 

« De manière générale, Netanyahou séduit dans les premiers échanges, mais très vite on se rend compte qu’il n’en fait qu’à sa tête », complète Denis Charbit, rappelant cette conversation informelle entre Sarkozy et Barack Obama, enregistrée à leur insu lors du sommet du G20 de Cannes (Alpes-Maritimes) en 2011, durant laquelle le président français avait traité le premier ministre israélien de « menteur » pour avoir multiplié les promesses sans jamais les tenir.

 

« Les Palestiniens sont en train d’être avalés »

Yves Aubin de La Messuzière, ancien directeur Afrique du Nord et Moyen-Orient (ANMO) au ministère des affaires étrangères (1999-2002), estime lui aussi qu’« on ne peut rien obtenir de Netanyahou ». Le premier ministre israélien, rappelle-t-il, parle d’« État-nation juif », en marginalisant les Palestiniens d’Israël, qui représentent pourtant 20 % de la population. « L’humiliation est permanente », affirme le diplomate, pointant « l’absence de courage » de la France, qui, selon lui, s’honorerait à rappeler plus souvent le droit international.

 

Face à un tel personnage, décrit par beaucoup comme « dangereux pour la démocratie », les relations diplomatiques n’ont jamais été simples. Et elles se sont compliquées davantage encore lorsque Donald Trump est devenu président des États-Unis. « Trump, c’est le rêve exaucé de Netanyahou », explique l’ancien ambassadeur d’Israël en France (2006-2010) Daniel Shek. « Du pain bénit », dit Jean-Paul Chagnollaud, pour qui « la capacité d’initiative » de Paris « s’est réduite comme peau de chagrin » en l’espace d’une décennie. 

 

« Emmanuel Macron colle aux États-Unis, alors que les États-Unis ont complètement basculé, poursuit le président de l’Iremmo. Même si les communiqués français dénoncent l’action de Trump [ce fut notamment le cas au moment du transfert de l’ambassade américaine de Tel-Aviv à Jérusalem – ndlr], ça reste des communiqués. Dans ce cadre-là, la France est au mieux neutralisée. » Selon lui, Paris est désormais « hors jeu au Moyen-Orient », d’où le fait qu’« il ne prenne pas de risque dans un dossier aussi complexe » que celui du conflit israélo-palestinien. « Ça s’est encore aggravé avec la crise iranienne », déplore-t-il.

 

Pour Denis Charbit, « la grande victoire de Netanyahou, c’est qu’il n’y a plus de négociation » avec quiconque. Regrettant « le désintérêt grandissant » de la communauté internationale pour le dossier israélo-palestinien, Daniel Shek explique – sans le justifier – cet abandon par l’émergence soudaine, dans la région, « d’événements plus inquiétants que ce conflit somnolent ». Les crises irakienne, syrienne, ou encore iranienne, ont « dominé la relation entre la France et le Proche-Orient » au cours des 15 dernières années, souligne l’ancien ambassadeur.

 

« Dans la diplomatie française, on considère que l’urgence n’est pas là en termes de stabilité, confirme Yves Aubin de La Messuzière. C’est une question marginalisée. La situation est objectivement explosive, mais on ne voit pas d’issue. On estime que c’est un conflit de basse intensité, dans la mesure où il n’y a pas de drames absolus. Et quand il y en a, comme en 2014 [avec le « carnage de Gaza », pour reprendre les mots de l’ancien ministre français des affaires étrangères Laurent Fabius – ndlr], on fait de la diplomatie émotionnelle. De la diplomatie à court terme. »

 

Pour le diplomate, Emmanuel Macron s’inscrit dans la droite ligne de ses deux prédécesseurs. « Il manque d’une vision globale » sur une question qui mériterait pourtant qu’on lui applique la « stratégie de l’audace » dont le chef de l’État s’était prévalu, à l’ouverture de la 27e conférence des ambassadeurs et des ambassadrices, en août 2019, dit-il. Or là, il ne se passe rien ou presque. Les expressions sont quasi inexistantes. De telle sorte que l’« on crée les conditions d’une nouvelle confrontation ».

 

Voilà donc plusieurs années que le dossier israélo-palestinien est au point mort. Au-delà de ce que les spécialistes du sujet qualifient de « rappels à l’eau tiède » du droit international et de la position de la France sur la solution à deux États, nombreux sont ceux à penser que plus personne ne s’intéresse vraiment à la question de la colonisation et des territoires occupés.

 

« On n’en parle plus à la société israélienne, comme si c’était normal », regrette Avirama Golan, éditorialiste pour le quotidien israélien Haaretz. « La question palestinienne est aussi un non-sujet dans la politique israélienne », indique Daniel Shek. Jean-Paul Chagnollaud évoque quant à lui la « radicalisation très forte du spectre politique israélien », où l’« on parle désormais d’annexion de manière ouverte ». Pendant ce temps, « les Palestiniens sont en train d’être avalés », alerte la Franco-Palestinienne Huda Al-Imam, qui milite « pour préserver l’identité palestinienne à Jérusalem » et ne croit pas, comme la plupart des jeunes Palestiniens d’ailleurs, à la solution des deux États. « J’aspire à un État multiculturel, avec la diversité et le respect des valeurs démocratiques », affirme-t-elle.

 

Convaincue qu’« Israël a détruit toute possibilité pour la paix », elle souhaiterait que « la France maintienne ses valeurs de fraternité, de liberté et d’égalité, en rappelant à l’État de Netanyahou la nécessité de les respecter », ainsi que le fameux « corpus separatum» de Jérusalem, décidé par les Nations unies en 1947. Pour l’heure, la France se contente de « regarder », souffle Huda Al-Imam. « Mais on n’a pas besoin d’une France qui observe, on a besoin d’une France qui prenne des initiatives. »

 

S’il reconnaît à Emmanuel Macron d’être « actif » sur la scène internationale, l’ancien ambassadeur d’Israël en France (2000-2002) Élie Barnavi estime que le chef de l’État est « coincé » par ce « corps mou et difficile à bouger » que constitue à ses yeux l’Union européenne (UE). « Je suis de ceux qui appellent à une politique forte de l’Union européenne, affirme le diplomate. L’Europe devrait parler d’une seule voix pour dire à Israël : “Il y a des choses que vous faites qui ne nous conviennent pas.” Et prendre les moyens de sanctions qui s’imposent. Mais l’Europe est incapable de tenir ce discours. Elle ne veut pas déplaire à Washington. »

 

De l’avis de chacun, la crise que traverse l’UE n’arrange évidemment rien : la montée des populismes, l’instabilité italienne, ou encore la fin de l’ère Angela Merkel en Allemagne, sont autant de facteurs d’inertie. « L’Europe est divisée, mais quelques pays pourraient prendre une initiative pour sauver la solution des deux États, sans pour autant se substituer aux Américains et à leur “deal du siècle”… », veut croire Yves Aubin de La Messuzière.

 

« Dissonance entre ce que la France dit et ce qu’elle fait »

 

Du côté des Palestiniens, les crises internationales sont surtout de bons prétextes au statu quo. « Les situations qui entourent la Palestine sont infiniment plus graves, mais lorsqu’elles n’existaient pas et que l’Europe avait plus de temps pour gérer le conflit, elle ne l’a pas fait non plus ! », note un diplomate, qui rappelle qu’Emmanuel Macron avait rejeté, en décembre 2017, l’idée d’une reconnaissance française de l’État palestinien – ce que la Suède a pourtant fait en 2014.

 

« Dire “nous reconnaîtrons collectivement ou nous ne reconnaîtrons pas” est le meilleur moyen de s’assurer qu’il n’y aura jamais de reconnaissance », ajoute-t-il, évoquant notamment ces pays d’Europe de l’Est, proches des États-Unis, et farouchement opposés à la demande formulée officiellement à l’UE par Mahmoud Abbas, en janvier 2018. Les messages adressés par les autorités palestiniennes à la communauté internationale sont d’autant moins pris en compte que ces autorités sont « affaiblies ». Rien de surprenant, souligne le même diplomate : « Le processus a commencé en 1991. Nous sommes en 2020 et il n’y a toujours pas de résultats… »

 

Huda Al-Imam, qui souhaiterait qu’Emmanuel Macron rencontre la société civile palestinienne lors de sa visite à Jérusalem, ne cache pas le fait d’avoir revu ses revendications à la baisse. « Avant, j’aurais demandé à la France qu’elle dise à Israël d’arrêter les colonies, de libérer les prisonniers… Maintenant, ce que nous demandons, c’est simplement de l’aide au quotidien : des projets de logements, la possibilité, pour les jeunes Palestiniens, de vivre en sécurité sans se faire arrêter et humilier. Les accords d’Oslo [en 1993 – ndlr] ne nous ont pas donné la justice et la liberté. Ce sont des symboles, mais ce n’est pas de ça que nous avons besoin. »

 

La militante estime que la Palestine a été « abandonnée par l’Europe et les pays arabes », notamment ceux du golfe Persique. Elle souhaiterait qu’émergent désormais « des idées fraîches ». «Abbas est à la fin, il n’a ni l’autorité ni la légitimité nécessaires pour peser sur la relance du processus de paix », avance également un diplomate. Certains évoquent « le fil d’espoir » que constitue l’élection, à la Knesset, de députés arabes, mais pour l’éditorialiste Avirama Golan, cette nouvelle force politique ne vaut pas grand-chose, dans la mesure où aucun parti israélien n’acceptera jamais de construire une coalition avec eux.

 

À l’affaiblissement du pouvoir palestinien répond l’émergence d’Israël sur la scène internationale. « Israël est puissant », affirme l’ancien ambassadeur Élie Barnavi, rappelant que la coopération avec la France est désormais « excellente dans tous les domaines ». « Économique, culturel, scientifique, sécuritaire… même stratégique s’agissant, par exemple, de la lutte contre le terrorisme », détaille Denis Charbit. C’est ce que ce professeur de sciences politiques qualifie de « relation à deux vitesses » : une attitude qu’il décrit comme « pragmatique », consistant « à délimiter soigneusement les domaines de coopération et les sujets qui fâchent ».

 

« Il y a une dissonance entre ce que la France dit et ce qu’elle fait », note aussi Élie Barnavi. « Macron confirme encore plus cette “politique de recentrage” que je fais remonter à 2003-2005, avec Dominique de Villepin », ajoute Denis Charbit, qui souligne que « la perception d’Israël comme start-up nation » avait déjà attiré « la curiosité bienveillante » d’Emmanuel Macron lorsqu’il était encore ministre de l’économie – il s’était rendu à Tel-Aviv en septembre 2015 pour inaugurer le stand français à l’ouverture d’une foire internationale high tech.

 

Depuis son accession à l’Élysée, cette bonne entente ne s’est jamais démentie, malgré toute l’ambiguïté qu’elle cultive : les fondamentaux diplomatiques – le rappel du droit international et la demande d’une solution à deux États – n’ont pas changé et, dans le même temps, les relations de coopération bilatérale se sont renforcées.

 

Un autre geste de la France est mentionné par tous nos interlocuteurs : la résolution du député LREM Sylvain Maillard élargissant la définition de l’antisémitisme à l’antisionisme, adoptée par l’Assemblée nationale, le 3 décembre 2019, et initiée par le président de la République. « Cela a été très bien perçu en Israël », indique Élie Barnavi. Certains se disent « choqués » ; d’autres estiment que « ce n’est pas un bon signe », en s’appuyant notamment sur les arguments développés par 127 intellectuels juifs dans une tribune du Monde ; d’autres encore soulèvent « une question complexe, à laquelle on ne peut pas répondre noir ou blanc ».

 

En tout état de cause, c’est « du jamais vu », affirme le journaliste israélien Daniel Ben-Simon. « Emmanuel Macron est allé au-delà de ses prédécesseurs », confirme Élie Barnavi. Pour Denis Charbit, ce geste s’inscrit dans une ambition diplomatique plus large : « Si on vient demander à Israël de se retirer des territoires palestiniens, il faut être très clair sur la légitimité du sionisme et de l’État d’Israël », dit-il.

 

Pour autant, le professeur de sciences politiques reconnaît que Benjamin Netanyahou « a souvent joué sur ces deux notions ». « Il ne cesse d’en parler, ça impressionne les chefs d’État », explique également Yves Aubin de La Messuzière. « D’une certaine manière, c’est un piège, car ça lui donne la légitimité de taxer d’antisémite chaque critique du gouvernement d’Israël, glisse un autre diplomate. C’est une banalisation dangereuse, surtout dans une période où il y a effectivement une résurgence d’antisémitisme. »

 

La lutte contre l’antisémitisme sera au coeur du déplacement des 22 et 23 janvier, indique l’Élysée. « Ça aura des résonances en France », assure la députée LREM Aurore Bergé, qui évoque notamment l’assassinat de Sarah Halimi, en avril 2017, pour lequel le principal suspect a été jugé pénalement irresponsable. Pour Jean-Paul Chagnollaud, il paraît d’ailleurs « impossible, dans un tel contexte, d’envisager un débat sur la politique israélienne ».

 

« C’est difficile de débattre de ces sujets quand on sort du mémorial de Yad Vashem… », conclut le président de l’Iremmo.

 

Boite noire

En raison de leur fonction, certains diplomates ont souhaité conserver leur anonymat. Il en va de même pour les conseillers de l’Élysée. Sauf mention contraire, toutes les personnes citées dans cet article ont été interrogées par téléphone, entre le 16 et le 19 janvier.