Signez massivement la pétition initiée
par l'AFPS et la CECP*
Depuis des jours Israël est présenté comme un modèle en matière de taux de vaccination de sa population contre le Covid-19. À de rares exceptions près, la réalité de cette politique de vaccination n’est pas détaillée. De plus, le statut de « puissance occupante » de cet État n’est que très rarement abordé.
On ne peut pourtant pas ignorer qu’Israël est depuis 1967 selon le droit international une puissance occupante, et doit par conséquent remplir les obligations définies par la quatrième Convention de Genève.
Comme le rappelle un appel initié par des organisations palestiniennes et israéliennes auquel l’AFPS s’est associée, « l’article 56 de la quatrième Convention de Genève prévoit expressément que l’occupant a le devoir de veiller à la santé publique dans le territoire occupé, "notamment en adoptant et en appliquant les mesures prophylactiques et préventives nécessaires pour combattre la propagation des maladies contagieuses et des épidémies". Ce devoir comprend le soutien à l’achat et à la distribution de vaccins à la population palestinienne sous son contrôle. »
Le comportement d’Israël a été fortement dénoncé l’année dernière quand, puissance occupante, elle a détruit des centres de santé mis en œuvre par des Palestiniens à Jérusalem ou à Hébron, quand elle arrêtait des volontaires qui désinfectaient les rues de Jérusalem-Est, quand elle laissait les prisonniers politiques palestiniens dans une situation sanitaire qui empêchait tout geste barrière et toute protection contre l’épidémie.
Des déclarations du ministre israélien de la sécurité publique, Amir Ohana, le 24 décembre 2020, qui donnaient instruction aux services compétents de ne pas vacciner les « prisonniers de sécurité », visaient de fait les prisonniers politiques palestiniens. Elles contredisaient les règles de priorité dans l’ordre de vaccination qui incluent en particulier les personnes âgées de plus de 60 ans. Les mauvaises conditions de santé de ces prisonniers auraient dû en faire des personnes à vacciner prioritairement. À ce jour, malgré les protestations engendrées suite à ces déclarations révoltantes et un léger embarras des autorités israéliennes, les prisonniers politiques palestiniens n’ont reçu aucune vaccination.
À Jérusalem-Est, territoire palestinien occupé et annexé illégalement par Israël, trois centres de vaccination ont été ouverts et les Palestiniens titulaires d’un permis de résidence peuvent s’y rendre. Cependant plusieurs centaines de milliers de Palestiniens de Jérusalem vivent reclus de l’autre côté du mur de séparation érigé par Israël. Ces quartiers ne bénéficient d’aucun service public et leurs habitants sont de facto dans l’impossibilité de recevoir le vaccin.
Dans le même temps, en territoire palestinien occupé, les colons qui vivent illégalement sur les terres volées aux Palestiniens bénéficient de la campagne de vaccination israélienne.
En ce qui concerne la Cisjordanie et la Bande de Gaza, territoires également occupés, rien : aucune campagne de vaccination n’est engagée et une hypothétique campagne de vaccination est tributaire de l’aide internationale dans un avenir indéterminé. Le droit international – et dans le cas présent la quatrième convention de Genève – est comme à l’accoutumée totalement ignoré et bafoué par Israël.
L’occupation, la colonisation, le blocus de Gaza ont mis l’économie et le système de santé palestiniens à genoux. Les Palestiniens se trouvent livrés à eux-mêmes et privés de la protection de la vaccination. Cette situation est absolument inacceptable.
Israël se doit d’apporter les fournitures et services nécessaires aux Palestiniens vivant sous occupation militaire. Cela ne doit plus être différé. Cette obligation doit lui être rappelée avec la plus grande fermeté. C’est ce que l’AFPS, aux côtés des ONG palestiniennes, demande instamment aux autorités françaises et européennes de faire.
Le Bureau national de l'Association France Palestine Solidarité
6 janvier 2021
Pétition adressée à : M. Josep Borrell, Haut-représentant de l’Union européenne pour la politique étrangère et de sécurité
Dans l’actuelle période de pandémie, l’État d’Israël est parfois présenté comme exemplaire en termes de vaccination. Or il laisse sans soins et sans vaccins la population palestinienne du territoire qu’il occupe en Cisjordanie et à Gaza, ainsi que toute une partie de la population palestinienne de Jérusalem, tout en apportant ces services aux habitants des colonies illégales en Cisjordanie occupée.Nous n’acceptons pas cette situation d’apartheid sanitaire, comme nous refusons la politique de colonisation, d’occupation, de blocus et d’apartheid qu’Israël fait subir au peuple palestinien.Israël, qui est toujours la puissance occupante, doit fournir à la population qu’elle occupe les vaccins en même quantité et qualité qu’à sa propre population, ainsi que les équipements de test, de protection, de soins (médicaments et oxygène) au même niveau que la population israélienne. Et les prisonniers palestiniens dans les prisons israéliennes doivent être protégés de la même manière.Nous demandons à l’Union européenne de rappeler fermement à Israël ses obligations de puissance occupante selon le droit international, en matière de santé, et de suspendre sa coopération avec Israël tant que ces obligations ne seront pas remplies.
* Coordination Européenne des Comités et associations pour la Palestine (CECP), située à Bruxelles, elle regroupe des collectifs et associations européennes de solidarité avec le peuple palestinien
Revue de presse :
Et dans l' Humanité du 6 janvier, l'article de Pierre Barbancey
Dans les territoires occupés, les camions israéliens viennent livrer les vaccins pour les colons. Des associations réclament le respect des conventions de Genève.
Pour Benyamin Netanyahou, l’enjeu de la vaccination contre le Covid-19 est d’abord et avant tout politique. Les élections générales doivent avoir lieu au mois de mars et il veut qu’à ce moment-là le pays, remonté contre les dirigeants politiques accusés d’une mauvaise gestion de la crise, ait retrouvé un semblant de normalité.
Pour cela, il est prêt à tout. Y compris à payer 62 dollars la dose (50,54 euros), contre 19,50 dollars payés par les États-Unis, comme l’a révélé le ministère israélien de la Santé. Pour le premier ministre, pouvoir annoncer qu’Israël est le premier pays au monde à sortir de la pandémie vaut toutes les publicités électorales. Mais si, en début de semaine, Tel-Aviv se vantait d’avoir déjà vacciné 1,3 million de personnes (objectif de cette campagne commencée le 19 décembre, 2 millions de doubles vaccinations d’ici à la la fin janvier), l’annonce, mardi matin, que des patients nouvellement infectés venaient de recevoir leur première injection a jeté un froid et amené le ministre de la Santé à demander un reconfinement total.
Près de 100 000 cas de contamination en Cisjordanie
Pour les millions de Palestiniens qui vivent sous contrôle israélien en Cisjordanie occupée et à Gaza, en revanche, aucun changement. Les autorités palestiniennes ont officiellement recensé près de 100 000 cas de contamination en Cisjordanie, pour plus d’un millier de décès. À Gaza, environ 42 738 malades, dont près de 400 sont décédés, ont été identifiés. Les camions israéliens sillonnent bien les routes de Cisjordanie mais c’est pour aller livrer les vaccins dans les colonies. Des milliers de colons en ont déjà bénéficié. Les Palestiniens, eux, devront attendre. Peut-être des mois. « Nous avons reçu une lettre officielle de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) selon laquelle l’acheminement des vaccins commencera le mois prochain afin de couvrir 20 % de la population », a indiqué Yasser Bouzia, un responsable au ministère palestinien de la Santé à Ramallah. Ces vaccins seront délivrés dans le cadre du dispositif Covax, mis en place par l’organisation onusienne et l’Alliance pour les vaccins (Gavi), qui rassemble environ 190 pays dont plus de 90 à revenus faibles et intermédiaires. Salama Ma’rouf, chef du bureau de presse du Hamas à Gaza, a estimé que les vaccins arriveraient « dans les deux mois », ajoutant qu’il y a une coordination entre l’OMS et l’Autorité palestinienne.
Des vaccins distribués aux frais de l’OMS
Pourtant, les vaccins destinés au Covax n’ont pas encore obtenu l’approbation de l’institution pour une « utilisation d’urgence », une condition préalable au début de la distribution. Gerald Rockenschaub, le chef du bureau de l’OMS à Jérusalem, a parlé, lui, de « début à mi-2021 » avant que les vaccins ne soient disponibles pour distribution dans les territoires palestiniens.
Les vaccins prévus dans le cadre du dispositif Covax seraient distribués aux frais de l’OMS et le reste de la population serait pris en charge sur le budget de l’Autorité palestinienne ou grâce à des pays donateurs. Israël peut se frotter les mains. Une dizaine d’organisations humanitaires israéliennes et palestiniennes (dont Physicians for Human Rights-Israel, The Palestinian Center for Human Rights ou encore Adalah) exhortent « les autorités israéliennes à honorer leurs obligations légales et à veiller à ce que des vaccins de qualité soient fournis aux Palestiniens vivant sous l’occupation et le contrôle israéliens en Cisjordanie et dans la bande de Gaza ». Elles soulignent que « l’article 56 de la 4e Convention de Genève prévoit expressément qu’un occupant a le devoir d’assurer l’adoption et l’application des mesures prophylactiques et préventives nécessaires pour lutter contre la propagation des maladies contagieuses et des épidémies ». Ce droit comprend le soutien à l’achat et à la distribution de vaccins à la population palestinienne sous son contrôle. Et les organisations signataires de préciser : « Les autorités israéliennes ne doivent pas déduire les coûts du vaccin des recettes fiscales qu’elles perçoivent au nom de l’Autorité palestinienne. » Reste que des milliers de Palestiniens, non vaccinés, continueront à aller travailler en Israël et dans les colonies…
L’incertain programme covax
Si Israël peut se permettre d’acheter 62 dollars une dose de vaccin, ce n’est pas le cas des Palestiniens. Ils dépendent du programme Covax. Celui-ci est le principal programme mondial de vaccination des populations des pays pauvres et à revenu intermédiaire contre le coronavirus. Il vise à fournir au moins 2 milliards de doses de vaccin d’ici à la fin de 2021 pour couvrir 20 % des personnes les plus vulnérables dans 91 pays, en Afrique, en Asie et en Amérique latine. Mais ce programme connaît déjà un manque de fonds, ce qui pourrait rendre impossible la réalisation de ses objectifs.